Durant les attentats qui ont touché la France et de nombreux autres pays depuis 2015, les réseaux sociaux ont été des espaces où s’informer en direct, organiser des actions de solidarité, témoigner de sa compassion, de sa colère ou de son deuil. Mais ils ont également été des arènes de formation de contre-publics , produisant et diffusant des discours en opposition aux « discours politico-médiatique dominants » . Si ces arènes alternatives enrichissent le débat public contemporain en garantissant une forme de pluralisme radical des opinions , elles ne doivent pas être assimilées à d’autres formes de réactions à contre-courant de l’émotion majoritaire, comme celles des théories complotistes, des discours haineux et de la propagande djihadiste, qui se caractérisent, contrairement aux prises de parole des contre-publics, par une volonté de manipuler l’opinion ou de légitimer le recours à la violence physique. Ce chapitre se propose de dresser un panorama non exhaustif des réactions en ligne aux attentats qui ont touché la France en 2015 et 2016. S’ancrant dans une perspective d’analyse des pratiques du numérique, il mobilise résultats d’enquêtes de terrain et revue de travaux scientifiques sur le sujet, et entend montrer comment le web et les réseaux sociaux reflètent les conflits de valeurs et de rationalités qui traversent la société française aujourd’hui.