Les situations sont des exercices spécifiquement conçus pour se préparer à la gestion de crise. Ils reposent sur des scénarios jalonnés d'étapes, chaque bulletin d'information déclinant un évènement auquel les participants doivent se confronter. Pour les rendres réalistes, ces scénarios s'appuient sur une réalité urbaine : les évènements qui y sont indiqués sont incarnés en des lieux, souvent précis (un bâtiment affecté par exemple). Pour penser géographiquement le passage de l'évènement perturbateur (séisme, explosion industrielle, attentat, etc.) à la catastrophe, nous avons ainsi mis en oeuvre une méthode originale consistant à spatialiser les scénarios de simulation de crise. Cette cartographie est un outil heuristique pour saisir la représentation de la crise en ville et en particulier identifier les espaces (lieux et territoires) qui servent de pronostics à la crise et que nous avons désignés par le terme d'amphibolie. C'est également un outil pour analyser les savoirs mobilisés lors de la construction de cette représentation par les experts. Cette méthode a été initialement mise en oeuvre lors de l'étude de la préparation à la gestion d'une crise d'origine sismique à Lima (Pérou). Le cas de la métropole péruvienne est d'autant plus intéressant que la ville n'a pas connu récemment de catastrophe majeure en lien avec un séisme. Le dernier ayant détruit la capitale date de 1746 quand la ville circonscrite à l'actuel centre historique comptait 50.000 habitants contre 10 millions pour l'agglomération actuelle. En l'absence d'expérience directe d'une catastrophe destructrice, comment élaborer un scénario de crise à des fins de préparation ? Quels sont les savoirs qui sont mobilisés pour dessiner la crise en ville ? A travers cette cartographie de la crise future, apparaissent des inégalités et des rapports de pouvoir propres à la ville. Au-delà du cas initial, nous mettons actuellement en oeuvre cet outil cartographique sur d'autres terrains notamment à Tunis, comme outil d'aide à la préparation, en inversant la démarche : organiser des ateliers de cartographie participative afin de faire émerger la représentation de la crise en ville des agents de la protection civile pour, dans un deuxième temps, élaborer des scénarios de préparations encore inexistants.