La France est l’un des pays où la classe sociale influence le plus les résultats scolaires. En France, l’école maternelle est conçue pour réduire les inégalités initiales devant l’école en fournissant aux élèves de classe populaire une plus grande familiarité vis-à-vis des apprentissages scolaires. Cependant, il apparaît que l’école maternelle ne réduit pas ces inégalités initiales (Colmant et al., 2002). L’objectif de ces deux études est d'examiner pourquoi l’école maternelle ne parvient pas à réduire les disparités initiales liées à l’origine sociale. Notre première hypothèse est que les contextes de classe ne permettent pas une participation orale égale des enfants, ceci en raison de normes académiques qui sont en accord avec la socialisation des enfants de classes moyenne et favorisée mais en décalage avec celle des enfants de classe populaire (Croizet, Marot, Goudeau, & Millet, 2017). Par ailleurs, notre deuxième hypothèse est que ces différences de participation sont perçues par les élèves comme la conséquence de différences de qualité individuelles (e.g., intelligence, motivation, Goudeau & Cimpian, 2021). Dans une première étude (N = 1 236 observations ; 98 enfants), nous avons constaté que les enfants de classe populaire sont moins susceptibles d’être interrogés et de prendre la parole spontanément comparativement à leurs camarades de classe plus favorisées. De plus, ils parlent significativement moins longtemps, que ce soit pour les contributions sollicitées et non sollicitées. Dans une deuxième étude, des élèves d’école maternelle (N = 94) devaient expliquer les différences de participation orale chez des enfants fictifs et évaluer ces élèves en termes de chaleur et compétence. Les résultats font apparaître que les élèves interprètent les différences de prise de parole principalement par le biais de facteurs internes (vs externes). De plus, ils ont également tendance à évaluer les enfants qui contribuent le plus à l’oral comme étant plus compétents et plus chaleureux. Le fait que les élèves de classe populaire participent moins, et qu’ils soient perçus moins positivement pourrait avoir des conséquences sur leur sentiment d’auto-efficacité et leur sentiment d’appartenance, pouvant ainsi entrainer une spirale négative qui contribuerait à creuser les inégalités scolaires.