Appartenir à une classe sociale renvoie à un contexte de socialisation se caractérisant par des différences d’accès à des ressources économiques, symboliques et/ou culturelles (Goudeau, Autin, & Croizet, 2017). Si la classe sociale peut être opérationnalisé en utilisant des critères objectifs (p. ex., diplôme, profession, type de sport pratiqué), un intérêt pour des opérationnalisations plus subjective de la classe sociale s’est accru au cours des dernières années, notamment au travers du recours à une échelle de mesure de la perception du rang social (Adler et al., 2000). En revanche, en ce qui concerne la dimension économique de la classe sociale, la majorité des travaux s’appuie sur des indicateurs relativement objectifs : les revenus, le patrimoine, l’endettement, etc. (p. ex., voir Howell & Howell, 2008). Or, une approche davantage fondée sur la subjectivité de la dimension économique de la classe sociale, prenant davantage en compte les perceptions des individus, pourrait s’avérer tout aussi pertinente. Sur ce point, de nombreux travaux portant sur les effets psychologiques du manque d’argent (“financial scarcity”) ont été conduits ces dernières années (p. ex., comme prédicteur de la prise de décision, l’aversion au risque ; de Bruijn & Antonides, 2021), mais il n’existe à ce jour aucune mesure validée. Nos travaux ont ainsi consisté au développement et à la validation d’une mesure de la précarité économique perçue (Perceived Economic Scarcity Scale ; PESS). Comme préconisé par Hinkin et al. (1997), un pool de 18 items a été généré et soumis aux participant·es d’une première étude préenregistrée (N = 300). Les résultats ont permis d’aboutir à une échelle en 9 items avec un seul facteur latent (exemple d’items : « I have less money than I feel I need »). Dans une seconde étude préenregistrée (N = 600), nous avons confirmé la structure unifactorielle de l’échelle et évalué sa validité divergente. Les analyses suggèrent que la PESS évalue un construit distinct (bien que corrélé) de ceux capturés par d’autres échelles traditionnellement reliés à la classe sociale (p. ex., statut social subjectif, privation relative personnelle, stress économique). Enfin, une troisième étude préenregistrée, en cours, s’intéresse à la validité prédictive de l’échelle et à sa fiabilité psychométrique. L’objectif est de déterminer si la PESS est bien corrélée à des construits associés au manque d’argent subjectif (e.g., bien-être, anxiété, décisions myopiques). L’intérêt de conceptualiser et d’opérationnaliser la classe sociale avec la PESS ainsi que d’examiner ses répercussions comportementales sera discuté.