On assiste aujourd’hui à une patrimonialisation des vignobles (Douence, 2012 ; Delaplace et Getelier, 2014). Y concourt l’essor de l’œnotourisme, bien qu’il ait touché tardivement la France (Lignon-Darmaillac, 2009). Les vignobles du Val de Loire ne sont pas épargnés ; « le processus de patrimonialisation et de territorialisation est une réalité » (Legouy et Vitré, 2013). Les paysages viticoles en constituent le fondement. Ils ont participé à l’inscription de la Loire au patrimoine mondial de l’UNESCO (Yengué, 2013). A quelle réalité correspondent cette patrimonialisation et la mise en avant du paysage viticole qui l’accompagne ? A quels enjeux répondent-elles ? Des différences existent-elles entre les vignobles de la région ? Dans cet article, sont comparés deux vignobles, l’un péri-urbain, l’autre rural, Vouvray et Bourgueil. Leurs dynamiques paysagères ont été analysées entre les années 1950 et aujourd’hui, grâce à la mise en place d’un SIG et la mobilisation de photographies aériennes et d’une carte IGN. Pour comprendre les enjeux, des observations ont été réalisées in situ. Des entretiens semi-directifs ont aussi été menés auprès des acteurs locaux (viticulteurs, syndicats des vins). Ils ont été complétés par l’analyse de sites internet et de la littérature grise. L’analyse des dynamiques d’occupation des sols révèle des oppositions. Les deux vignobles connaissant des trajectoires bien distinctes : l’un progresse pendant que l’autre régresse. Vouvray est en effet confronté à la menace de l’urbanisation, en raison de la proximité de l’agglomération tourangelle, même si ceci est à relativiser – la progression du bâti ne suffit pas à expliquer le recul du vignoble. Pour autant, dans les deux vignobles s’observent une mobilisation et une patrimonialisation du paysage viticole pour faire face aux défis actuels, progression de l’urbain et concurrence économique. Ceci est perceptible sur le territoire autant que dans les discours. Ces derniers n’émanent pas seulement des acteurs viti-vinicoles, même s’ils revendiquent davantage l’historicité de ces paysages. Ces actions procèdent d’une volonté de promouvoir, comme ailleurs, l’œnotourisme et les « œnoloisirs » avec l’objectif pour les vignerons de trouver une nouvelle clientèle et, pour les autres acteurs, d’œuvrer au développement territorial. De telles actions sont ainsi perceptibles sur les territoires bourgueillois et vouvrillons.