Cet article vise à rapprocher les problématiques de littératie en santé de celles concernant les inégalités sociales et territoriales sous l’angle des inégalités épistémiques. À partir de l’étude d’un programme d’éducation thérapeutique pour des patients sous anticancéreux oraux, nous analysons les conditions de participation des patients et de visibilité de leurs savoirs. Les entretiens individuels et les ateliers collectifs du programme, tout comme son format pédagogique, sont autant d’espaces d’interactions qui valorisent ou occultent des expériences de patients. À ce titre, deux ans d’observation des ateliers et 23 entretiens nous permettent de mettre en relation l’activité des participants et le contexte institutionnel dans lequel se déroulent les interactions. Certains profils de patients porteurs de compétences bien spécifiques en matière de littératie sont plus engagés/à l'aise que d’autres et plus valorisés/visibilisés dans ce dispositif d’ETP du fait de la dynamique des interactions entre soignants et patients et entre patients. Outre des conditions de recrutement au sein du programme, nous observons des formes d’auto-sélection dans les ateliers. Les soignants participent à la valorisation des compétences en littératie déployées par certains patients au détriment d’autres. En outre, ces mêmes patients se font porte-parole d’un dispositif qui leur est favorable.