Il est fréquemment admis que le temps chronologique de l’urgence vient assujettir la gestion de crise. A partir du cas de la fuite d’un nuage toxique provenant d’une usine, nous montrons que l’expertise peut permettre de mettre à distance la temporalité de l’urgence pour inscrire la gestion de crise dans un temps gouvernable. Cet article analyse ainsi les capacités des acteurs de la gestion de crise à proposer différentes temporalités au travers de leurs projections prédictives de l’évènement. Il sera montré que cela tient certes aux positionnements des acteurs par rapport à cette temporalité, mais aussi aux espaces qui participent de la dynamique des trajectoires d’expertise, en tant qu’instance d’élaboration des connaissances entre experts, mais aussi en tant que mise en visibilité et définition du problème en interaction avec les autorités locales et nationales. C’est ainsi que se construit et se précise le cadrage temporel souhaitable et souhaité de l’évènement. Le rapport même à la temporalité de l'urgence est relativisé par la diversité des futurs possibles envisagés dans les espaces d’expertise où ils se discutent.