Une centralité de bonne qualité constitue une des conditions de l’héritage touristique, culturel mais aussi économique d’une agglomération qui a accueilli un méga événement. En Urbanisme, le centre se définit de la façon suivante : « Le centre est un regroupement d’équipements de nature diverse et d’un nombre variable organisé et intégré dans un réseau d’infrastructures. Il assure des prestations de services d’un certain niveau. Il favorise les échanges et les diffusions des informations, il participe à la distribution, consommation de certains biens pour une population donnée distribuée dans une aire urbaine déterminée et délimitée » (Zuchelli, 1983). La Géographie ajoute la notion d’attractivité et définit le centre ainsi : « La centralité qualifie la capacité d'action d'un centre urbain sur sa périphérie en termes de desserte, de services, d'attractivité, et d'une manière générale, de polarisation. En géographie, l'espace qualifié de centre ne se trouve donc pas nécessairement au milieu de l'espace qu'il contrôle » (définition Géoconfluences). Les équipements, les services, les possibilités d’échanges et de circulation, etc, rendent le centre attractif pour une population habitante ou touristique. Or, les territoires concernés n’ont pas toujours au départ les caractéristiques d’un centre, ce qui rend le processus de transformation urbaine et d’évolution des pratiques patrimoniales, culturelles et touristiques particulièrement visible. Les Jeux Olympiques sont souvent pour cela un catalyseur. Les logiques (dont les logiques culturelles et touristiques) en lien avec un projet urbain après les Jeux restent peu étudiées (Gold and Gold 2017). Cette communication propose d’analyser : - comment un centre touristique et culturel se forme à l’occasion d’un grand événement comme les Jeux Olympiques ? - quels impact positifs et négatifs cette transformation urbaine peut avoir en matière de pratiques culturelles (fréquentation des musées et sites antiques), touristiques (offre airbnb) ? - et à quelles conditions, notamment en matière de planification et de financement ? Le cas d’étude proposé est celui de Plaka à Athènes, qui a fait l’objet d’une politique de régénération urbaine à l’occasion des Jeux de 2004 (Henry, 2005). Plaka ne comportait pas d’infrastructures sportives, mais devait être un quartier support de la démarche de régénération urbaine et de valorisation de la capitale grecque qui devait profiter de l’opportunité des Jeux. Ce quartier historique était géographiquement central avant les Jeux, mais sans en posséder les atouts. Le trafic était congestionné, le bâti très vétuste, parfois construit sans permis, les ruelles étroites, et le patrimoine antique très peu valorisé (Henry, 2005). La loi 2730/1999 (et les plans directeurs) élaborés parallèlement au dossier de candidature d’Athènes 2004 prévoyaient « le développement d’infrastructures pour le sport, la culture, le tourisme et les services sociaux, (…), la protection, la conservation et le développement de l’héritage naturel et culturel de l’Attique et la promotion de l’histoire, la culture et l’esthétique de la ville ». Actuellement, la majeure partie du bâti a été rénovée et son esthétique soignée, un musée moderne de l’Acropole a été construit, le patrimoine antique disséminé a été particulièrement mis en valeur au moyen d’un cheminement piéton, les réseaux ont été modernisés, la place Syntagma est devenue le hub du réseau de métro, rendant Plaka accessible depuis de nombreux quartiers périphériques d’Athènes, des restaurants, boutiques, hôtels, etc ont été ouverts, etc. La valorisation du quartier est presque achevée 15 ans après les Jeux, alors que ce n’est pas le cas des autres sites (Doustaly, Zembri-Mary, 2019). La méthodologie consiste à : - qualifier les caractéristiques urbaines du site avant les JO (congestion, état du bâti, accessibilité, services, mise en valeur du patrimoine, etc). - lister les équipements, infrastructures et services culturels et touristiques de centralité présents sur le site après les JO, qualifier leur qualité (niveaux de qualité de l’hôtellerie, etc). - qualifier la qualité de l’accessibilité après les JO (temps de parcours depuis les périphéries, fréquence, accessibilité, etc). - analyser deux indicateurs de pratiques culturelles (la fréquentation touristique du site du Parthénon et du musée de l’Acropole) et de pratiques touristiques (le développement de l’offre Airbnb). - analyser un indicateur économique : la hausse du prix des locations et de l’offre airbnb, et son impact sur le logement des athéniens. - analyser les plans directeurs successifs et le dossier de candidature qui ont anticipé la transformation du site. - analyser les modalités de financement public et privé (particuliers, investisseurs, fondations privées). Les résultats attendus sont les suivants : Plaka est rapidement devenu un centre urbain culturel et touristique reconnu à Athènes, au sens des définitions précédentes, grâce à une démarche de planification et de mise en valeur publique, soutenue par des investissements publics (transport, voirie, etc) et privés (soit de particuliers : rénovation du bâti, restauration, etc ; soit d’investisseurs : hôtellerie de luxe ; soit de fondations privées : musée). Parmi les sites concernés par la régénération urbaine à l’occasion des Jeux, seule Plaka a bénéficié d’un dynamisme public-privé réussi qui s’explique par une volonté politique et sociétale liée à l’attachement pour l’héritage antique qui a servi de catalyseur au projet urbain. Ce processus se retrouve depuis peu dans un autre quartier (Phalère). A Athènes, le grand événement a déclenché la décision publique de faire un projet de régénération urbaine, dont le quasi achèvement s’explique par une opération urbaine culturelle et patrimoniale, à la différence de Stratford (site de Londres 2012) dont le dynamisme est fondé en particulier sur une démarche de planification et de densification mise en œuvre par le secteur privé dans une logique de retour sur investissement, accompagné dans une moindre mesure par le développement de pratiques culturelles et sportives nécessitées par la « legacy ». Les deux indicateurs étudiés montrent une forte fréquentation des musées et sites, mais assez saisonnière. L’offre de logements à Plaka est très largement devenue une offre Airbnb. Les Jeux ont amélioré le positionnement d’Athènes comme une grande ville culturelle et touristique sur la longue durée dans un contexte de concurrence et de crise financière, mais le modèle économique de l’offre locative de type Airbnb pose des problématiques spécifiques : peu de logements vacants pour les athéniens, obligation pour ces derniers de se loger en périphérie, augmentation des loyers. Cette situation peut générer un mécontentement local. Ces impacts négatifs se retrouvent également dans d’autres villes européennes. Au final, la création d’une centralité culturelle et touristique est, dans le cas de Plaka, bénéfique en termes d’image, de valorisation, de retombées économiques, mais l’est moins pour l’activité traditionnelle non touristique et pour le logement des habitants. Une politique publique créative associant les deux enjeux semble nécessaire dès le début des Jeux.