La vision, comme tous les sens humains, est un sens actif et cognitif à des niveaux divers. Il y a toujours acte de participation dans la lecture et l'écriture du visible. Avant qu'une lecture de signes iconiques, symboliques ou indiciels puisse s'interpréter, le monde physique perçu comme indépendant de soi doit s'instaurer. Cette instauration d'un monde physique est possible par l'empathie où l'infans développe la capacité de se mettre à la place d'autrui. Le milieu primordial s'inaugure comme indépendant lorsque l'enfant est capable d'imaginer le regard de l'autre. Le détachement d'un monde transcendant est au départ affectif nous dit Axel Honneth, dans La réification 1. C'est par l'Autre, que le monde apparaît comme monde situé à l'extérieur de soi. En même temps que le monde s'externalise, le sujet s'internalise dans une relation de réciprocité. La reconnaissance d'un soi, d'un monde est intrinsèquement liée à un partage intersubjectif où l'autre nous désigne comme sujet. Avec l'acquisition du langage, l'espace du monde s'inscrit dans une structuration symbolique, articulée par une temporalité linéaire que soumet le sens de l'écriture d'une pensée et auquel s'articule également un mode du visible. L'écriture selon J.Derrida 2 est ce qui va créer l'ordonnancement phénoménal dans une logique linéaire et artificiellement cohérente, créant un écart entre l'immédiateté d'un temps qui se fait et se défait simultanément et une couche surajoutée à l'événement.