Cette communication aborde la culture politique des intellectuels républicains espagnols exilés au Mexique à travers un exemple précis : l’articulation d’un nouveau discours sur l’Etat chez ces intellectuels qui jouissaient, sous la Seconde République, de positions sociales influentes et d’une audience inédite au sein de la société civile et de la sphère politique. Brutalement expulsés du sol national, dans des conditions le plus souvent dramatiques, ces intellectuels se trouvent face à un double défi : d’une part, reconfigurer leur identité et légitimer leur situation vis à vis de la société mexicaine, et d’autre part réorienter leur production théorique en fonction de ces nouveaux paramètres. La communication tâche de mettre en relief la rupture que signifie l’exil pour les cultures politiques républicaines et la resignification du nationalisme dans l’imaginaire politique des exilés. Le concept d’Etat, central dans tout discours politique, ainsi que ceux de nation, de territoire, de citoyenneté, d’identité, sont autant de notions auxquelles l’exil impose un changement brutal de signification, qui s’opère autant par un remodèlement doctrinal que par une reconfiguration de l’imaginaire collectif. Pour montrer ces processus à l’œuvre, l’analyse porte sur le cas de la revue 'Las Españas', publiée par un petit groupe d’exilés entre les années 1947 et 1956 au Mexique. Ce cas est représentatif du rôle des intellectuels dans l’élaboration de l’identité collective des réfugiés, de la resignification d’un certain nombre de concepts appartenant à l’imaginaire républicain préalable à l’exil, de la construction ou de la refonte de mythes, de valeurs et de symboles qui constituent le socle de nouvelles cultures politiques, et de l’évolution, enfin, du discours théorique et programmatique que produisent ces nouvelles cultures politiques.