L’enseignement de l’informatique est inscrit dans les programmes de l’école primaire depuis 2015. Comme le rappellent Baron et Drot-Delange (2016), cet enseignement a une double visée : éduquer les élèves à une culture technique et informatique, en leur donnant les moyens de comprendre les traitements réalisés par les systèmes qu’ils utilisent, et les initier à des notions en informatique. La manipulation d’artefacts virtuels (logiciel...) ou réels (robot programmable...) peut servir à ces visées. Elle est un des fondements de l'apprentissage de l’informatique dans un cadre scolaire comme le montrent les travaux de Papert (1980) & d'Harel et Papert (1991). Se pose alors la question du choix, par les enseignants, du matériel (robots, logiciels...) qui peut servir de support à un tel enseignement. Ce matériel est financé par les communes suite à des demandes provenant des équipes pédagogiques. Comment sont définies ces demandes ? Dans une perspective didactique (Fluckiger, 2019), cette question s’inscrit dans une nécessité plus large de constituer un ensemble de connaissances relatives aux pratiques enseignantes pour un apprentissage de l’informatique. Nous cherchons à identifier les variations et les non-variations, pour reprendre Bru (2002), afin de rendre compte des processus et des contenus en jeu. Une hypothèse affirmée est que la diversité des enseignants et des contextes matériels laisse supposer une variété de mises en œuvre. Interroger cette tension entre la diversité des acteurs et des équipements permettra de déterminer dans quelle mesure, comme le précise Lebeaume (2002), le contexte et les conditions matérielles conditionnent la mise en œuvre de l’enseignement de l’informatique dans les classes. Les raisons du choix même des artefacts semblent en effet dépendre de facteurs variés, qui vont au-delà des questions de disponibilité et contraintes matérielles qui pèsent. Une première étude, menée auprès de jeunes professeurs des écoles (Grugier, 2019), montrait que le vocabulaire qui est présent dans les programmes, comme le terme de robot, recouvrait des conceptions variées faisant parfois référence à des usages domestiques, industriels mais peu pédagogiques. Nous cherchons à investiguer l’influence de ces conceptions sur la façon dont les enseignants prennent en charge cet enseignement de l’informatique, notamment sur le choix des artefacts retenus pour construire cet enseignement Nous interrogeons comment ces choix peuvent également dépendre de la connaissance (subjective) que les enseignants peuvent avoir de ces artefacts, des finalités qu’ils assignent à cet enseignement (comme réduire les inégalités, préparer les élèves à la compréhension d’un monde technicisé, etc.), des savoirs qu’ils vont viser, des modes d’évaluations prévus de ces savoirs, ou encore du sentiment d’être accompagné ou entouré (collègues, eRun, etc.). Pour montrer à la fois des variations dans les pratiques d’une mise en œuvre d’un enseignement de l’informatique et caractériser les choix matériels qui conditionnent cet enseignement, nous nous appuierons d’une part sur un questionnaire diffusé à des enseignants, d’autre part sur une quinzaine d’entretiens semi-directifs longs d’enseignants d’école primaire.