Les métiers du champ du social – nous mobilisons cette expression générique dans un sens large, c’est-à-dire en incluant le métier d’éducateur spécialisé, de moniteur-éducateur, de chef de service, d’assistant de service social mais aussi le métier de formateur en insertion – sont traversés, comme la plupart des métiers adressés à autrui, par des tensions et contradictions qui ont une double origine. D’une part, les mutations sociales transforment et rendent plus complexes les pratiques ordinaires des professionnels du social auprès de publics plus variés et qui rencontrent des difficultés plurielles ; ces mutations exigent de posséder des compétences elles-mêmes plurielles et de les mettre en œuvre dans des environnements organisationnels et juridiques en forte évolution. D’autre part, un effort de rationalisation des métiers du social depuis une dizaine d’années, que traduisent notamment les référentiels de compétences, tend à imposer, dans un environnement économique où les ressources sont contraintes, une logique managériale qui vient bousculer l’idée même de travail social (Piot, 2007). Ce double mouvement – mutations externes et rationalisation interne – induit des tensions voire des contradictions qui viennent interroger, réorganiser, mettre en tension les compétences et les identités des professionnels du secteur social.

Dans un premier temps, l'auteur propose une mise en perspective historique de la génèse et de l'évolution du champ du travail social dans la société moderne (niveau macro). Dans une seconde partie, il mobilisera une approche ergonomique étayée par une enquête empirique réalisée dans un contexte de formation continue. Les matériaux de cette enquête ont été recueillis via des dispositifs d'analyse de pratique professionnelle centrés sur l'explication (Vermersch, 1999). Le recueil des matériaux a été conduit dans le cadre de séminaires de formation continue d'assistants/assistantes de services sociaux et d'éducateurs/éducatrices spécialisé(e)s. l'auteur prendra appui sur l'analyse de ces données issues de ces situations de formation pour tenter de comprendre en quoi la rationalisation et l'émergence d'une professionnalité dans le champ du travail social constituent une ressource nécessaire et posent des difficultés récurrentes sur le terrain (niveau méso et micro).

1 – Introduction

2 – Genèse et développement du travail social à l’époque moderne
2.1 – Émergence de la modernité et invention des politiques sociales
2.2 – La seconde modernité et les transformations de l’intervention sociale
2.3 – Du travail social au niveau macro à l’activité du travailleur social au niveau micro

3 – Approche du travail social du point de vue de la didactique professionnelle : analyser l’activité dans ses différences plurielles
3.1 – Le cadre théorique de la didactique professionnelle adapté aux métiers adressés à autrui
3.2 – Les savoirs expérientiels et incorporés dans le travail social : une place peu reconnue mais stratégique
3.3 – Des situations de travail prises entre l’urgence et la souffrance : quelle place pour le travail bien fait ?

4 – Conclusion