Déclaré Patrimoine culturel de l’Humanité par l’UNESCO en 1991, le Parc national de la Serra da Capivara a été créé pour préserver plus de 1500 sites archéologiques. Parmi ces sites, plus de 1200 Tocas ou grottes peintes sont datées de la phase de transition Pléistocène/Holocène. De très nombreux autres sites archéologiques de plein air ou en grotte sont aussi attestés. Le plus célèbre d’entre eux est le site du Boqueirão da Pedra Furada. Sa découverte, en 1980, et les fouilles qui s’en suivirent, dirigées successivement par N. Guidon et F. Parenti, ont permis de mettre au jour pour la première fois au Brésil une séquence stratigraphique allant de l’Holocène jusqu’au début du Pléistocène supérieur, datée au delà de 40 000 ans (MIS3). Cette ancienneté, allant à l’encontre du paradigme limitant l’ancienneté de la colonisation des Amériques au-delà de 12000 ans, a provoqué une très forte polémique. Néanmoins, d’autres sites, tant en Amérique du Sud avec les sites de Monte Verde au sud, de Taima Taima au Venezuela, qu’en Amérique du Nord avec les sites de Meadowcroft en Pennsylvanie et de Cactus Hill aux Etats-Unis, tous fouillés à la même époque – années 80- semblaient confirmer cette réalité. Mais, ces faits allaient à l’encontre de la doxa. Inacceptables, ils furent récusés. Il faudra attendre 2005 pour qu’une une nouvelle expertise, menée par les Professeurs E. Boëda et E. Fogaça, amène à la création d’une nouvelle mission archéologique française financée par le Ministère Français des Affaires Etrangères et Européennes et relance la thématique des premiers peuplements américains à partir du potentiel archéologique qu’offre le sud du Piaui. Après deux programmes quadriennaux, dirigés successivement par M. Rasse et E. Boëda, la présence d’une occupation Pléistocène à partir de 40 000 ans est définitivement attestée. Les nouveaux sites de la Vale da Pedra, sítio do Meio, de Tira Peia, de la Pena, de Barra da Jamela da Antonião, Livierac et Coqueiros offrent chacun une séquence stratigraphique avec de nombreux niveaux archéologiques s’échelonnant globalement entre 40 000 et le début de l’Holocène ancien. A ces sites, nous devons rajouter celui de Boqueirão da Pedra Furada, où une nouvelle fouille aux dépens d’un témoin restant a été entreprise par notre équipe. La concentration de sites pléistocènes dans cette micro-région du Piauí est conséquente et indique un processus de peuplement de l’Amérique du Sud bien plus ancien comme l’attesteraient les anciennes données du site de Boqueirão. Quoiqu’il en soit, les recherches actuelles continuent à élargir la base de données pour déterminer l’identité culturelle des groupes humains qui se sont succédés. A savoir, avons-nous affaire à une colonisation ancienne durant le MIS3 et qui se serait développée sur place, ou à des phénomènes de peuplements successifs, témoins de pulsions migratrices multiples durant ce même stade isotopique comme le laissent supposer certaines données ? Autrement dit, après avoir répondu positivement à la question de l’existence de populations pléistocènes, nous orientons nos recherches sur l’analyse du phénomène de peuplement : à la recherche d’identités culturelles, de chemins migratoires et du tempo migratoire.