Le Lîeu est un projet en cours de constitution, dont la visée est la création d’un espace de rencontre et d’échange ouvert à tous, et en particulier aux personnes en grande précarité. Porté depuis des années par un collectif aux contours mouvants (le Parlons-En), ce projet a soudainement remporté l’adhésion des habitants en devenant lauréat du budget participatif 2017 de la Ville de Grenoble. Concrètement, cela s’est traduit par la dotation d’un budget d’investissement conséquent (260 000 €) dédié à la réhabilitation d’un bâtiment vacant (et vétuste) mis à disposition par la municipalité. Dans le cadre de cette communication nous proposons un double regard sur la situation. Il s’agira ainsi d’observer ce que la participation au budget participatif fait au projet du Lîeu : en terme d’organisation et d’implication du collectif, d’obligation à arrêter les besoins et les formes du projet lorsque celui-ci prône les principes d’ouverture à l’inattendu et de mutabilité des espaces, sur la nécessité ressenti par les porteurs de formuler le récit du projet pour ne pas en perdre le fil, etc. Mais il s’agira aussi de s’intéresser à ce que le Lîeu fait en retour au processus de projet de l’institution qui l’encadre, puisque la forme atypique du Lîeu et du collectif qui le porte n’est pas sans influences dans la manière qu’ont les services de la Ville de fonctionner. Ainsi, à travers cette étude de cas, il en va tout autant de l’institutionnalisation des démarches ascendantes que de « l’ascendancialisation » des institutions. Notre propos s’appuiera sur les données collectées lors d’une enquête ethnographique menée pendant trois ans auprès du Parlons-en (conjointement avec Anthony Pecqueux, ANR HAPARÊTRE). À travers la chronique du Lîeu il s’agira aussi de mettre en discussion ce qui prend part à une posture processuelle singulière que l’on pourrait qualifier d’« en-projet ».