Les nouveaux rythmes de vie et l’apparition des outils numériques ont, entre autres facteurs, influencé la formation des adultes. Tout doit se faire plus rapidement, plus efficacement, avec plus de résultats. L’objectif étant de pouvoir trouver du temps pour se former dans un monde où tout évolue constamment, la formation ouverte et à distance (FOAD) permet aux apprenants d’organiser leur emploi du temps, de ne pas se déplacer et de se former dans des conditions plus adaptées à la nouvelle culture occidentale. Le monde universitaire n’échappe pas à ce mouvement avec les expérimentations sur la FOAD et l’utilisation des plateformes d’enseignement en ligne comme Moodle [1]. Daniel (1996) rappelle que l’enseignement universitaire a pour but de faire comprendre ce qui va au-delà de l’information et du savoir. Partons du principe que connaître l’individu, ses connaissances et compétences intérieurement acquises, son parcours et ses objectifs est primordial pour penser une formation adaptée à ses besoins, la formation universitaire à distance permet-elle l’accompagnement de l’individu dans sa globalité ? Notre contribution s’appuie sur une thèse en cours portant sur la place de l’expérience des apprenants dans une formation à distance. Après un retour historique sur l’évolution de la formation à distance à l’Université, nous nous appuyons sur l’analyse qualitative des données singulières recueillies dans le cadre d’un entretien semi-directif auprès d’une enseignante-chercheuse. Plus précisément, nous analyserons ces expériences en tant qu’intervenante auprès des enseignants en deuxième année du Master MEEF, spécialisé dans la préparation aux métiers de l’enseignement, à l’École supérieure du professorat et de l'éducation (ESPE) dans une formation hybride. Elle intervient auprès d’une soixantaine d’étudiants en formation continue et initiale sur la préparation du CRPE, concours de recrutement de professeurs des écoles. Toutes ces expériences comportent des actions qui peuvent devenir sources d’apprentissage dans la mesure où la personne réfléchit sur son action. C’est le mot anglais to experience qui est introduit par Dewey (1938) et traduit en français par le néologisme « s’expériencer ». S’expériencer c’est « faire l’expérience de », c’est l’expérience vécue, conçue comme expérimentation dans une activité libre et délibérée. Nous repérons donc une alternance entre théorie et pratique, formation universitaire et expériences professionnelles qui, pour être formatrice, doit permettre un retour réflexif sur les expériences vécues. Pour que la pratique soit source d’apprentissage elle doit se laisser problématiser. Mais l’expérience ne s’enseigne pas, elle s’accompagne. Le rôle de l’enseignant n’est donc plus de transmettre les savoirs mais plutôt d’être à côté de l’étudiant pour aller où il va en même temps que lui (Paul, 2004). Si l’accompagnement de l’étudiant pour donner du sens à ses expériences dans une formation en alternance est une pratique répandue, la question à laquelle nous essaierons de répondre à partir de l’analyse du vécu singulier d’une professeure, en lien avec les types de dispositifs hybrides (Jézégou, 2014) est : comment la distance modifie ces pratiques et la place de l’expérience dans une formation universitaire ? À travers cette analyse nous souhaitons introduire deux éléments de discussion : Quel accompagnement pour une alternance intégrative (Chartier, 2004) et dialogique (Denoyel, 2002) dans une formation à distance afin de permettre la continuité expérientielle (Dewey, 1938) des alternants ? Comment la formation à distance transforme les pratiques de l’accompagnement mises en place par les formateurs tant en présentiel qu’à distance : fonction, relation, démarche et posture d’accompagnement (Paul, 2004) ? [1] Plateforme de formation en ligne, développée par un doctorant australien et utilisée dans 231 pays et dans 86 % des universités françaises, selon Thierry Koscielniak, directeur de la pédagogie numérique à l'université Paris-Descartes (Jardin, 2016).