Morlaix et Suchaut (2012) ont montré que certains facteurs apparaissaient premiers dans la réussite. Il s’agit des variables classiques liées au parcours scolaire des étudiants (retard scolaire, série de baccalauréat, mention obtenue), les capacités cognitives, la catégorie sociale et le projet professionnel apparaissant comme des indicateurs secondaires, quoique non négligeables. Viau (1994) rappelle que « La motivation est un concept dynamique qui a ses origines dans la perception qu’un élève a de lui-même et de son environnement et qui l’incite à choisir une activité, à s’y engager et à persévérer dans son accomplissement afin d’atteindre un but ». Orange (2010) met quant à elle en lumière le fait que les étudiants d’origine populaire qui n’auraient pas le « bon bac » finiraient par intégrer l’idée selon laquelle l’université n’est pas faite pour eux. L'article se propose de rendre compte de deux recherches que nous avons réalisées en 2015 et 2016 auprès d’étudiants de 1ere et 2eme année de Droit et de Sciences de l’éducation. Ces recherches s’appuient sur la théorie fonctionnelle de la cognition et la méthode de la mesure fonctionnelle qui lui est associée (Anderson, 1981, 1996 ; Michalot, 2010). Cette dernière permet de manière expérimentale de modéliser le jugement que portent les étudiants sur les probabilités de réussir un premier semestre dans leur propre filière et en fonction de plusieurs critères. Nous avons retenu des critères antérieurs à l’entrée à l’université comme le type de bac et la mention obtenue, mais également des critères propres à la formation universitaire telle que la motivation et l’engagement dans la formation. Les résultats montrent clairement que si pour expliquer la réussite aux examens du premier semestre tous les étudiants donnent beaucoup d’importance à l’investissement dans la formation, il existe néanmoins des différences importantes entre les étudiants de Droit et ceux de Sciences de l’éducation. Les premiers donnent plus d’importance aux types de bacs et à la mention que les étudiants en Sciences de l’éducation. De plus, si l’évaluation formulée pas les étudiants en Sciences de l’éducation reste pratiquement constante au cours de la formation, cela n’est pas le cas avec des étudiants de Droit. En deuxième année, ils donnent de plus en plus d’importance au type de bac et à la mention obtenue pour évaluer la probabilité de réussir. Ainsi, dans ce département, les étudiants intègreraient rapidement que si l’effort est indispensable pour valider le premier semestre, le type de bac et la mention obtenue sont également déterminants pour réussir en Droit. Ces résultats nous permettent de penser que dans cette filière, certains étudiants ne seraient pas considérés comme légitimes et que ces derniers intègreraient rapidement que l’effort et la volonté ne sont pas suffisants pour réussir. Ce sentiment de manque de légitimité serait moins flagrant en Sciences de l’éducation, car les étudiants jugent de manière constante que pour réussir, la persévérance et le travail sont plus importants que le parcours scolaire antérieur.