Si une des propriétés remarquées par les linguistes pour qualifier la spécificité de la parole des adultes destinée aux enfants est l'emploi de la troisième personne pour s'adresser à eux/elles (Maingueneau 1981, Morgenstern 2006 et 2014), une autre caractéristique – tout aussi notable, mais négligée par l'analyse linguistique – est la propension qu'ont les adultes à parler des enfants en leur présence, sans les inclure dans les destinataires officiels de l'échange. Ce faisant, ils/elles peuvent être exposé.e.s à différentes formes de violence verbale liées aux différentes manières, pour l'enfant, de ne pas être le destinataire du discours. Par exemple, l'enfant peut surprendre le discours des adultes sans que ceux-ci en aient conscience ou bien l'enfant peut être l'objet d'un dialogue tenu en sa présence mais sans voix au chapitre. Très fréquent, ce type d'interaction entre adultes – qui serait jugé totalement déplacé si le tiers était un autre adulte – possède aux yeux de l'enfant une efficacité redoutable due à sa position de simple spectateur de la violence verbale dont il est l'objet. L'objectif de cette communication sera d'analyser les mécanismes linguistiques propres à cette violence en mobilisant, pour en décrire ses effets, les concepts de la théorie des actes de parole. Prenant pour corpus l'écriture autobiographique (Vallès, Leduc, Ernaux), notre étude se déploiera en fonction de deux axes. Ainsi, nous commencerons par étudier la violence verbale portée sur l'enfant-témoin en convoquant le couple notionnel intentionnel / non intentionnel et cet examen nous conduira à revisiter la dichotomie illocutoire / perlocutoire. A l'aune des résultats obtenus, nous proposerons alors une analyse comparative des propriétés linguistiques du langage discriminatoire violent, d'un côté, dans un contexte dialogal et, de l'autre, dans une situation où l'enfant est auditeur non-allocutaire.