Le paradoxe d'une normalisation durable des projets urbains qui diversifie les morphologies
Résumé
L'ampleur du changement climatique conduit les acteurs de la production urbaine, comme
beaucoup d'autres, à intégrer les objectifs d'atténuation et d'adaptation aux effets du
changement climatique dans leur activité et notamment dans la conception des projets
urbains. L'intensité et la soudaineté de ces nouveaux objectifs -eu égard aux temporalités de la
transformation de la ville - pourrait remettre en cause non seulement les pratiques mais aussi
les savoirs et les méthodes de l'urbanisme.
La matérialité physique de ces objectifs (réduire les émissions de gaz à effet de serre,
s'adapter à des aléas naturels croissants...) offre a priori une importance croissante à la
technique et aux ingénieurs dans la conception urbaine. Elle fait craindre une durabilité
techniciste (Boissonade 2015), une tentation de standardisation des comportements des
habitants (Renauld 2014) ou des formes bâties (Neuwels 2013) telle que l'architecture et
l'urbanisme ont connu par le passé (l'hygiénisme et le modernisme).
Les pouvoirs publics - collectivités pionnières et Etat - et privés ont développé des outils et
infléchi des procédures relatifs à la construction d'édifice, à l'urbanisme opérationnel et à la
planification spatiale afin que la ville et les bâtiments résultant des projets urbains soit
davantage alignés avec les objectifs climatiques au nom de la durabilité.
Par cette communication nous souhaitons montrer que la normalisation durable dans le champ
de l'urbanisme ne porte pas sur le produit matériel du projet urbain (les morphologies bâties
ou des équipements technologiques) mais sur son processus et qu'elle incite à une recontextualisation
des objectifs des projets urbains. Cela pourrait conduire, pour le moment,
davantage à une diversification des morphologies urbaines et bâties qu'à leur standardisation,
contrairement à la période moderniste.
Alors que l'atténuation, c'est-à-dire la réduction des émissions de gaz à effet de serre en
réponse au problème du changement climatique, est prépondérante parmi les objectifs
généraux de la durabilité, l'on peut s'interroger sur les raisons de cet appel à re-contextualiser
les projets urbains. Nous nous demandons, en guise de conclusion, si la normalisation durable
en cours préfigure les approches du projet urbain de demain ou si elle est une phase transitoire
vers une prédominance de l'objectif d'atténuation ; la réponse varie selon le cadre théorique
mobilisé.