L'article étudie l'influence de la construction du genre et de la racialisation sur la motivation qui conduit des hommes et des femmes nationaux à participer aux mouvements de défense des droits des couples binationaux en France. La prise de conscience des traitements délassants, sexués et racialisants opérés par l'État lors des contrôles de la véracité des unions conduit certains membres des couples binationaux à agir collectivement. Ces individus transforment les émotions éprouvées individuellement lors des rencontres avec l'appareil étatique en la motivation d'une militance qui réunit hommes et femmes, principalement nationaux. Les femmes nationales, avec les hommes étrangers, sont la cible principale de l'appareil étatique. Affectées par une " pensée d'État " paternaliste, elles participent davantage par rapport aux hommes nationaux. Toutefois, ces femmes s'affranchissent du regard employé par les agents de l'État qui les conçoivent à la fois comme les reproductrices de la nation et des actrices faibles. Elles s'engagent en tant que citoyennes et non pas en tant que femmes. De ce fait, les hommes ont toute leur place dans ces collectifs. Les conjoints étrangers de ces femmes, pour leur part, sont discrédités en raison d'une masculinité qui, dans l'imaginaire socio-institutionnel, reste dérangeante. Couplés avec l'instabilité administrative, ce déclassement et cette mise en altérité par l'État d'installation les conduisent à être plus prudents dans la participation.