Les califes Fatimides (909-1171) mirent en place une marine active et efficace dès les premières décennies de leur règne en Ifrîqiyya – Tunisie actuelle. Si la documentation relative à cette première phase ne permet guère de comprendre comment la flotte fut financée, à partir du milieu du XI e siècle, alors que les califes se trouvaient désormais en Égypte, les textes – documents administratifs, manuels d'administration et traités fiscaux – témoignent de la mise en place d'un système de plus en plus complexe d'administration et de financement de la flotte. Ce système trouva sa pleine mesure avec les croisades, lorsque la marine devint la principale force de résistance des Fatimides à l'avancée franque. Ainsi, les sources attestent avant tout d'une activité croissante de la marine de guerre durant toute la période considérée ici. Au-delà des exploits des flottes fatimides, célébrés dès le X e siècle, quelques documents permettent de comprendre que ces succès n'étaient pas dus qu'au seul hasard. C'est en effet l'image d'une flotte professionnelle, à l'organisation et au commandement rationnalisés, et soucieuse d'innovation qui se dessine progressivement. Autant d'éléments qui invitent à s'interroger sur le financement de la marine de guerre fatimide. Les sources témoignent du développement d'un système complexe d'achats de matières premières stratégiques qui s'appuyait sur les services douaniers. Ce système, atypique pour la période, permit aux Fatimides de concevoir une marine qui constituait l'outil essentiel de légitimation des prétentions universalistes de la dynastie ismaélienne face à ses concurrentes sunnites.