Dans l’esprit des carnets de dessins de Léonard de Vinci où l’art se mêle au calcul, le traité de Kircher confère à l’homme géométrique, un pouvoir où l'imagination peut jouer un rôle aussi déterminant que les déductions logiques. L' In folio offre en effet une iconographie très évocatrice. Chez Kircher, les explications sur la propagation du son ne sont pas toujours scientifiquement valides semble relever de la magie ; elles passent avant tout par l’image accompagnée d’un texte plus descriptif que démonstratif. Par analogie, avec les rayons lumineux Kircher imagine la propagation des rayons sonores à l’intérieur des cornets acoustiques qu’il dessine volontairement courbes pour – croit-il - amplifier le son. A une époque où l'acoustique n'est pas encore constituée en tant que science autonome, Kircher puise ces inventions de voyages en Orient où il a certainement fait l’expérience de nombreux dispositifs sonores. Ces utopies dessinées sont la trace d’expériences sonores perçus. Ce sont ces connaissances empiriques sur la propagation des sons qui lui permettent d’inventer une lutherie innovante. L’originalité de Kircher est de transcender les échelles : il devient ainsi le premier à évoquer l’idée d’une ville-instrument (Regnault, 2001) et peut, à ce titre, être considéré comme le précurseur à la fois de l’acoustique urbaine et de la toute récente pensée sur le paysage sonore (Schafer,1973).