Cet article porte sur la présence de l’autre dans la narration et la mise en scène du rituel chez les Kulung, petit groupe de langue tibéto-birmane vivant dans l'Himalaya népalais. Ces figures de l'autre qui nous intéresseront sont celles d'esprits errants et prédateurs, émanations de l'altérité dangereuse des autres groupes. La présentation de ces esprits fera apparaître l'existence de deux ensembles : ceux, esprits issus de morts appartenant à d’autres groupes kirant, dont le rituel est fait en « parler rituel », et ceux, esprits issus de morts indo-népalais, dont le rituel est réalisé en népali. On rapportera le type de traitement rituel de ces deux ensembles d’esprits avec la localisation spatiale des groupes dont ils émanent, montrant ainsi comment le mode de pacification de ces esprits trahit le rapport que les Kulung entretiennent avec les groupes dont ces esprits sont dits émaner. En guise de conclusion, on s'intéressera à l'importance des devins, autre forme de présence des autres dans le rituel puisqu'ils peuvent appartenir à n'importe quel groupe, dans l'émergence d'une forme de religiosité régionale. On verra ainsi qu’il est important de penser tous les phénomènes à première vue qualifiables d’ « emprunts » ou d’ « acculturation ».