Intérêts et faisabilité d'un vêlage très précoce chez la génisse Holstein (premier résultats)
Résumé
L’âge au 1er vêlage est un levier de fléxisécurité important et intéressant pour les élevages à court,
moyen et long terme (Institut de l’Elevage, 2013). En France, l’âge au 1er vêlage se situe aux alentours
de 30 mois, alors que l’optimum économique se situerait plutôt vers 24 mois. Dans le cas d’un vêlage
groupé et/ou saisonné sur une seule période, cet âge se situe aux alentours de 36 ou de 24 mois.
Dans ce dernier cas, le 1er vêlage des animaux nés tardivement en saison est généralement repoussé
au-delà de 32 mois d’âge, les animaux vêlant avec ceux de la génération suivante. Une alternative
possible à cette pratique est d’accélérer la croissance des jeunes et donc, de les mettre plus tôt à la
reproduction, pour un âge au 1er vêlage avant 24 mois. La bibliographie sur un âge au 1er vêlage
précoce montre le plus souvent des effets négatifs sur la production des animaux, ce qui explique en
partie une certaine réticence à avancer l’âge au 1er vêlage dans les élevages. L’effet négatif d’un âge
de 24 mois au 1er vêlage ou en deçà est toutefois de plus en plus discuté dans la littérature. Trois
générations de génisses laitières Holstein ont ainsi été élevées au sein de l’élevage expérimental de
Méjusseaume (Le Rheu, 35), pour un âge au 1er vêlage compris entre 21 et 27 mois. Les génisses
sont nées au cours des saisons de vêlage (septembre-janvier) 2009-2010 (G1, n=67), 2010-2011 (G2,
n=80) et 2011-2012 (G3, n=65). Pour les génisses nées avant le 1er décembre, des programmes
alimentaires mis en place visent à obtenir des croissances permettant d’atteindre des poids de 210 kg
(lot N) ou 230 kg (lot H1) à 6 mois d’âge. Les régimes et conduites sont ensuite identiques jusqu’au
vêlage. Les génisses nées après le 1er décembre (H2) suivent le même régime que celles du lot H1
jusqu’à 6 mois d’âge. Elles reçoivent ensuite un régime alimentaire spécial, y compris au pâturage,
composé de fourrages et de concentrés et ceci, jusqu’à la mise à la reproduction. L’objectif est
d’atteindre un poids d’au moins 370 kg à 12 mois d’âge. Les inséminations artificielles (IA) sont
réalisées sur chaleurs détectées après synchronisation. L’analyse des profils de progestérone
plasmatique a été réalisée sur les 65 animaux G3. Au final, 57 génisses ont été détectées pubères
avant synchronisation des IA, à l’âge moyen de 10,2 (+2,0) mois, pour un poids vif de 296 (+ 37) kg.
Les plus jeunes sont pubères avant l’âge de 7,5 mois (n=7). L’âge au 1er vêlage n’a pas eu d’effet sur
les difficultés de vêlage (G1 et G2 ; n=105). Sur les 15 premières semaines de lactation, les animaux
vêlant avant l’âge de 22,5 mois (n=30) ont des performances laitières inférieures à celles vêlant après
(entre 22,5 et 24 mois, n=39 ; ou au-delà de 24 mois, n=36) : 2730 vs 2920 kg en cumulé (p < 0,05).
Les animaux sont aussi plus légers au vêlage (498, 528 et 563 kg respectivement), mais cette
différence diminue avec le temps (539, 552 et 575 kg à 15 semaines de lactation). Cette évolution
s’explique notamment par un niveau d’ingestion journalière équivalente entre animaux, alors que les
animaux les plus légers et les plus jeunes produisent moins de lait. Outre le poids, ceci s’est traduit
aussi par une évolution plus forte de gabarit chez ces animaux sur la même période. Corrigée de l’effet
poids, aucune différence de production laitière, ni de qualité de lait n’est observée. Les performances
de reproduction analysées sur un nombre limité d’animaux à ce jour ne semblent pas montrer un effet défavorable du vêlage très précoce (analyses effectuées sur taux de réussite à l’IA et profils de de
progestérone dans le lait). Ces résultats, à confirmer lors de la 3ème saison de vêlage de 2013-2014
(G3) tendent à montrer qu’un 1er vêlage très précoce, si bien préparé, est possible. Les effets à long
terme restent à analyser si possible au sein de l’élevage, mais également à partir de données issues
d’un autre élevage expérimental ayant adopté une stratégie similaire.