Les membranes de production d’eau potable subissent fréquemment des phases de régénération afin d’éviter le développement d’agents pathogènes dans les installations et d’éliminer le colmatage qui découle de la f iltration. Comme le montre de nombreuses études, ces nettoyages chimiques sont responsables d’un e accélération du vieillissement des matériaux qui peut conduire à la rupture d’une ou plusieurs membranes dans un module. On pourrait croire le sujet désormais bien appréhendé et maîtrisé, pourtant, la démarche mise en place lors des études précédentes est une procédure de vieillisse ment accéléré postulant que les effets d’une concentration élevée pendant un temps court seraient équivalents à ceux d’une concentration faible pendant un temps long et ce, quelles que soient les propriétés observées (aussi bien microscopiques que macroscopiques). Pour cela, le paramètre c × t (concentration × temps) est largement répandu pour sa commodité, afin de réduire la durée des expériences de vieillissement. Initialement utilisé en pharmacologie et bactériologie, la validité de ce paramètre et son adéquation avec le vieillissement membranaire effectivement rencontré sur site n’ont jamais été rigoureusement vérifiée. De ce fait, certains auteurs se sont orientés vers la méthodologie des plans d’expériences [1]. C’est cet te démarche que nous avons mise en place pour étudier le vieillissement statique de membranes de production d’eau potable en polysulfone au contact d’hypochlorite de sodium, en conditions industrielles. Les modifications des propriétés de transfert (perméabilité) et des propriét és mécaniques des membranes (allongement à la rupture) ont été modélisées avec succès et ont permis de mettre en place des modèles statistiques prédictifs du vieillissement statique au contact de NaOCl (R² = 0.96). Afin d’évaluer si les effets d’un protocole de vieillissement accéléré étaient comparables à ceux d’un vieillissement en conditions industrielles, nous avons réalisé, pour certaines conditions de vieillissement testées avec le plan d’expériences (100, 200 et 400 ppm pendant 45, 90 et 180 jours, à 5°C, 20°C, et 40°C), des expériences correspondant au même c × t (18000 ppm.jour), à différents pH (pH 8,0 et 11,0), pour des concen trations beaucoup plus élevées et des durées beaucoup plus courtes (6000, 3600 et 2570 ppm pendant 3, 5 et 7 jours, à 5°C, 20°C et 40°C). Les effets observés à la suite des deux protocoles de vieillissement utilisés diffèrent de façon significative. Pour ce qui est du plan d’expériences, les analyses statistiques ont prouvé sa validité. Pour ce qui est du paramètre c × t, le bien-fondé de son utilisation, indifféremment appliquée à l’étude des propriétés macroscopiques et microscopiques, peut être remise en cause dans les conditions étudiées.