L'officier arlésien François Rebatu (1588/1662) nous a laissé trois volumineux recueils manuscrits qui témoignent d'une pratique d'écriture quasi-quotidienne et très hétérogène (poésies, comptes, dessins, transcriptions d'actes publics, correspondances, lieux communs, travaux d'érudition...). Ce témoignage exceptionnel s'inscrit dans une double temporalité par la conjonction d'une continuité linéaire liée à des datations parfois fictionnelles et d'une reconstruction a posteriori d'écritures fragmentaires. C'est ainsi que s'esquisse dans un dispositif complexe un autoportrait fortement marqué par la figure morale du magistrat, inséré dans une sociabilité municipale intense. Mais cet autoportrait recouvre aussi l'amertume sociale d'un officier moyen dans une ville dominée par la noblesse. Il s'incarne alors également, par des fragments narratifs ou énonciatifs souvent très brefs, dans la figure d'un sujet d'opinion en quête de légitimité et d'un témoin attestant de sa simple présence au monde.