Comprendre les mécanismes d'émergence régionale et mondiale d'organismes pathogènes dans le cadre des changements globaux constitue un des défis scientifiques posés à l'écologie. Selon les estimations, de 60 % à 80 % des organismes pathogènes pour les humains ont une origine animale ou un lien indirect avec la faune. L'écologie de la transmission des maladies infectieuses conduit le plus souvent à étudier des processus impliquant des interactions entre plusieurs espèces, voire entre plusieurs communautés. La distribution spatiale et les dynamiques temporelles des maladies infectieuses sont en effet dépendantes de la biodiversité, de la dynamique des populations d'hôtes, de l'herbivorie, de la prédation, de la dispersion individuelle et de l'hétérogénéité des conditions physiques et chimiques, toutes variables contrôlées à des degrés divers par le paysage. Pavlovski (1964) a forgé le terme "épidémiologie paysagère", Rioux et al. (1990), celui d'éco-épidémiologie pour désigner une approche systémique intégrant des méthodes héritées de l'écologie et de l'épidémiologie. Elle pointe l'importance de la définition de risques spatiaux, temporels, et populationnels. Cependant, les concepts de l'écologie du paysage y sont peu ou pas intégrés, de même que l'importance de l'observation multi-échelle des dynamiques de population d'hôtes et des interactions entre paysage et ces dynamiques (Giraudoux et al. 2008). Patz et al. (2004) dans un article intitulé "Unhealthy landscapes: policy recommendations on land use change and infectious disease emergence" recommandent la création et le soutien de centres de recherche et d'enseignement d'excellence en écologie et santé, afin, entre autres, de faciliter la conduite de recherches interdisciplinaires et la formation de professionnels capables d'accompagner non seulement ce type de recherche mais aussi la diffusion des résultats acquis en direction du grand public et des décideurs. Les concepts élaborés dans le domaine de l'écologie du paysage sont particulièrement adaptés à ce type d'intégration pluridisciplinaire où doivent se rencontrer spécialistes de la biodiversité, de la dynamique des populations, des sciences de la santé (humaine, animale et végétale) et des sciences humaines. Cette communication a pour but de présenter le cadre général de cette approche et de l'illustrer par quelques exemples.