Depuis le continent, et en particulier depuis la France, Hobbes est principalement perçu comme un penseur du politique. Cette perspective n'est pas nouvelle puisque Descartes luimême négligea les critiques adressées par Hobbes aux Méditations : les réponses proposées aux Troisièmes objections sont lapidaires tant le philosophe français accorde peu d'importance aux études physiques, métaphysiques et anthropologiques de son confrère britannique. Cette tradition de lecture et de réception des oeuvres de Hobbes ne doit toutefois pas masquer pour le lecteur contemporain l'importance du projet scientifique hobbesien.

De l'aveu même de Hobbes, c'est en se faisant physicien qu'il devint philosophe. En 1672, soit à l'âge vénérable de 84 ans, Hobbes entreprend de rédiger son autobiographie en vers latins. Il raconte ainsi comment, à l'occasion d'un séjour en France, il fit la rencontre de Mersenne.

Là [à Paris], je fais la connaissance de Mersenne : je lui parle Du mouvement des choses sur lesquelles j'ai médité. Il m'approuve, et me recommande à beaucoup ; à partir de ce moment, Je comptai moi aussi au nombre des philosophes. Revenu dans ma patrie après huit mois, Je pense à la manière de relier tout ce que je savais, Pour qu'à la lumière des principes, les conséquences puissent resplendir, Et subsister longtemps par la force de cet enchaînement. En partant de la variété des mouvements, je suis conduit, pour la variété des choses, À leurs apparences dissemblables et aux ruses de la matière ; Aux mouvements à l'intérieur des hommes, à ce qui est caché dans leurs coeurs ; Et enfin aux bienfaits de l'État et de la justice. Voilà les études dans lesquelles je me suis plongé. Car toute espèce de philosophie Traite du corps, de l'homme et du citoyen. À ces sujets, je décide de consacrer trois livres. 1