« Mens sive anima, l’âme forme substantielle et pensée dans quelques passages des Dialogues de l’idiot sur la sagesse et l’esprit de Nicolas de Cues : à mi-chemin entre la scolastique et Descartes » - Centre d'Etudes Supérieures de la Renaissance Accéder directement au contenu
Communication Dans Un Congrès Année : 2022

« Mens sive anima, l’âme forme substantielle et pensée dans quelques passages des Dialogues de l’idiot sur la sagesse et l’esprit de Nicolas de Cues : à mi-chemin entre la scolastique et Descartes »

Résumé

Nicolas de Cues, dans le second livre de ses Dialogues de l’idiot sur la sagesse et l’esprit, décrit la pensée (mens) comme âme (anima), « substance vivante » dont la fonction est d’animer le corps, ce renversement majeur n’empêchant pas la mens de demeurer « forme substantielle », dans la lignée aristotélicienne. Sa puissance d’animation concerne aussi bien les vies végétative, sensible et intellectuelle, et se caractérise en tant qu’intellection par la complicatio, une sorte de repli infini dans la Sagesse divine qui caractérise la mens comme image de Dieu. Là où la Pensée infinie de Dieu crée ex nihilo les êtres en les concevant, la pensée humaine les assimile comme images. Cette caractéristique la rend supérieure à toutes les autres réalités de la Création, puisque ces dernières ne sont images de Dieu que pensées par la pensée humaine. Loin de distinguer une mens subsistante et une autre fonctionnelle qui animerait le corps, le Cusain insiste sur l’identité entre les deux, fondée dans le fait que cette mens humaine n’est elle aussi qu’image. Cette approche s’écarte cependant nettement de la conception de l’âme comme image trinitaire développée par Augustin dans son De Trinitate. Chez lui, la connaissance réflexive de l’âme purement spirituelle, dans ses trois facultés, mémoire, intelligence et volonté, s’ancre dans l’expérience de la vie. Contrairement à ce qu’affirmera Descartes, l’intelligence seule ne suffit pas à l’âme pour acquérir la certitude de soi, mais elle a aussi besoin de la volonté. Naturellement, dans l’acte même de se rappeler, se comprendre et s’aimer elle-même, elle se tourne vers celui qui l’a créée, mouvement qui la rend sage de la Sagesse de Dieu. Or si le Cusain affirme aussi que la mens est une image trinitaire, il rejette les analogies augustiniennes qu’il juge trop anthropomorphiques en leur préférant les analogies métamathématiques pythagoriciennes : unité unissante, Égalité de l’unité et Lien qui les unit. Aucun modèle idéal ne s’interpose entre Dieu et la pensée de chaque homme, qui en est image en tant qu’elle exerce sa capacité créatrice. Le Cusain semble ainsi perdre la dimension 17 éthique de la conception augustinienne, ouvrant la voie à la réduction cartésienne du cogito ; il développe cependant une conception dynamique de l’âme humaine comme pensée créative, tendant asymptotiquement en sa perfectibilité indéfinie vers la perfection infinie de la simplicité divine.
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Dates et versions

hal-03916933 , version 1 (31-12-2022)

Identifiants

  • HAL Id : hal-03916933 , version 1

Citer

Christian Trottmann. « Mens sive anima, l’âme forme substantielle et pensée dans quelques passages des Dialogues de l’idiot sur la sagesse et l’esprit de Nicolas de Cues : à mi-chemin entre la scolastique et Descartes ». Penser l'âme au temps de son éclipse, les ressources de l'anthropologie chrétienne, Mar 2022, Lyon, France. ⟨hal-03916933⟩
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