Cet ouvrage permet à S. J. R. Ellis de réaliser une ambitieuse synthèse sur le commerce de détail. L'auteur souligne l'évolution du cadre et des pratiques qui lui sont associés en s'appuyant sur des données archéologiques et à travers trois moments clés décrits comme autant de "révolutions". L'auteur cherche à souligner à quel point les boutiques jouent un rôle fondamental dans les mécanismes socio-économiques romains mais aussi dans les paysages urbains, de par leur ubiquité. Il s'inscrit ainsi dans la lignée des études récentes qui ont appréhendé la taberna dans ses diverses réalités, commerciales et artisanales, aussi bien à Rome, 1 dans les cités vésuviennes, 2 à Ostie 3 ou dans les provinces. 4 La bibliographie très complète à la fin de l'ouvrage témoigne d'ailleurs de cette insertion dans un courant de recherche dynamique. L'originalité de son approche réside cependant dans la volonté de dépasser la synthèse de site ou régionale et de proposer une vision évolutive d'un phénomène urbain et de ses réalités archéologiques, en corrélant les informations issues d'une vaste aire géographique. Cette ambition permet à l'auteur d'appréhender les réalités du commerce de proximité aussi bien par le prisme de l'architecture, des structures fonctionnelles, de la topographie, des acteurs ou encore des réflexions sociales et économiques sous-jacentes. L'auteur s'appuie sur un corpus imposant de 123 sites, présenté dans le chapitre introductif. Les sites italiens sont au nombre de 44 tandis que les sites répartis dans les provinces sont issus principalement d'Afrique ( 27) et d'Orient (22), mais aussi de Gaule (12) et dans une moindre mesure d'Hispanie (10) et de Grèce/Balkans (8). Les données archéologiques sont issues d'un travail de prospection sur le terrain et dans la documentation, mais surtout des fouilles de la Porta Stabia (Pompéi I 1 et VIII 7) qu'il dirige depuis 2005 où 20 boutiques au total ont pu être dégagées. C'est ce corpus diversifié qui sert de base à un propos oscillant entre conclusions globalisantes et études de cas précises. D'une part, l'auteur fait preuve d'une volonté louable d'élargir la réflexion au-delà de la triade de sites généralement étudiée (soit Ostie, Pompéi et Herculanum) et par là-même d'obtenir un corpus suffisamment conséquent pour en étudier les tendances globales. 5 D'autre part, tout au long de l'ouvrage l'auteur accorde une importance plus marquée à Pompéi en raison de la richesse des données et de leur degré de conservation 1 C. Holleran, Shopping in ancient Rome (Oxford 2012).

2 N. Monteix, Les lieux de métier: boutiques et ateliers d'Herculanum (Rome 2010); M. Flohr, The world of the fullo: work, economy, and society in Roman Italy (Oxford 2013).

3 J. Schoevaert, Les boutiques d'Ostie : l'économie urbaine au quotidien (Rome 2018), publié après la sortie de l'ouvrage commenté ici.

4 T. Amraoui, L'artisanat dans les cités antiques de l'Algérie (Oxford 2017). 5 On peut cependant regretter que la Gaule soit représentée presque exclusivement par des occurrences situées dans la province de Narbonnaise. Voir, par exemple, pour la Gaule Lyonnaise, E. Delaval, "Formes d'habitat collectif à Lyon et Vienne en milieu artisanal et commercial," Revue du Nord 343 (2001) p. 35-48, ou P. Chardron-Picault et M. Pernot (edd.), Un quartier antique d'artisanat métallurgique à Autun (Saône-et-Loire). Le site du Lycée militaire (DAF 76, 1999); pour la Gaule Aquitaine, A. M. Jouquand, "Des ateliers et des boutiques en bordure d'un complexe monumental (thermes, forum?) à Poitiers à la fin du III e s. apr.